RUE DANIEL MICHENOT
C'est à juste titre que cette rue du Grallet, une portion de la départementale D242, porte le nom du plus charismatique des maires de Breuillet. La propriété familiale où vécut Daniel Michenot se situe en effet au bord de cette rue. Sa fille, Anne-Marie est l'épouse de Philippe Grenier qui fut récemment premier adjoint au maire.
Né le 13 juin 1883 à La Rochelle dans une famille protestante originaire de Breuillet — son père, Élie, était instituteur — le jeune Daniel fréquente l'école primaire de Marennes, le lycée de Nantes et suit des études universitaires à Paris. Il en sort docteur en théologie.
En fin de cursus, il soutient une thèse, qui sera publiée sous forme de plaquette, sur l'art de parler, la diction, la voix, le geste. Il saura, tout au long de sa vie, mettre la pratique en conformité avec la théorie.
Interrompue par la guerre de 14-18 qu'il passe dans les tranchées comme officier et qui lui vaut la Croix de guerre, sa carrière professionnelle, démarrée à Lausanne, se poursuit à Strasbourg à partir de 1919. Le voilà professeur de diction et d'art dramatique au Conservatoire de cette ville. Un de ses élèves, Pierre Pfimlin, deviendra même le dernier Président du Conseil de la Quatrième République. Les deux homme entretiendront par la suite une solide amitié qui sera sans doute fort utile au futur maire Breuillet.
À partir de 1926, Daniel Michenot mène une brillante carrière de conférencier international, pour l'Alliance française, qui le conduit en Angleterre, aux États-Unis, au Canada, en Belgique aux Pays-Bas où il rencontre la reine Juliana. Il intervient aussi à la radio, crée sa troupe de théâtre, fréquente des artistes de renom... Partout, il défend la langue française ce qui lui vaut d'être fait Chevalier de la Légion d'Honneur en 1938.
Plus de détails sur sa "période strasbourgeoise" dans un article de "La vie en Alsace", dans les années trente.
Pendant l'occupation, qu'il passe à Breuillet, il a la douleur de perdre son fils adoptif, Jean, héros de la Résistance fusillé par les Allemands (le 1er Février 1944). Plus de détails ICI.
À la Libération, après un bref retour à Strasbourg, Daniel Michenot prend sa retraite et rentre à Breuillet en 1947. Il devient maire de la commune la même année, succédant à Marcel Lucas. Après 5 ans de guerre, de nombreuses difficultés l'attendent... Tout est à rebâtir. Il exerce son mandat avec passion jusqu'au 7 juin 1961, date de sa mort. Soutenu par son premier adjoint, Abel Guérin, qui sera son successeur, et par un secrétaire de mairie actif, Henri Marie, il s'attelle à la tâche. Le réseau routier est reconstitué, les écoles modernisées. Il réussit en outre le délicat remembrement des propriétés rurales.
Président du Rotary Club de Royan, Vice-Président du Bibliobus, membre de la Commission de protection des sites, Président du Comité artistique de Saintonge, il sait imprimer à la commune la marque sociale d'un élu lettré dont les prises de parole remarquables (le 11 novembre, le 14 juillet, pour la fête des écoles...) n'excluent pas une grande proximité avec la population. Il devient Président du Syndicat de la Rive Gauche de la Seudre en 1949 et, grâce à ses multiples relations, il réussit à accélérer l'adduction d'eau de toute la Presqu'île d'Arvert qui sera effective à Breuillet dès 1951. Il entreprend aussi la construction du groupe scolaire qu'il n'aura malheureusement pas le temps d'inaugurer.
Par ailleurs, sa sensibilité artistique l'amène à créer une salle des fêtes, au fond de la place située en face de "Chez Max". Cette salle devient rapidement très active : théâtre, cinéma, spectacles divers. On a du mal à imaginer, aujourd'hui, une telle effervescence culturelle dans une commune comptant 782 habitants en 1954 ! Le maire lui-même participe parfois à ces spectacles. Odette Comandon — une grande amie de la famille — va jusqu'à lui écrire une pièce (Moun' anghe aimé). Daniel Michenot et sa fille Anne-Marie montent alors sur les planches aux côtés de la célèbre jhavasse des Charentes. À cette occasion, cet amoureux de la langue française s'initie au patois saintongeais. Très connu dans tous les milieux culturels de la région, Daniel Michenot est notamment sollicité pour dire le très fameux poème, Bonjour Saintonge, lors de l'inauguration du monument dédié à son auteur, Goulebenéze, par la ville de Saintes.
Dans le même temps, sa dynamique épouse crée une boutique de tissus, Aux Dames de Saintonge, dans le bourg, à l'emplacement de l'actuel commerce de fruits et légumes. Voir des images ICI. Un peu plus tard, elle ouvre au Grallet une pension de famille, Le Courtil, qui accueille de nombreux touristes, Suisses notamment.
Attaché à la nature, à nos bois, nos champs et nos marais, Daniel Michenot, qui fut aussi Président de la Société de chasse, aimait débusquer la bécasse dans ses recoins les plus secrets en compagnie de chiens hors ligne. Son élégance vestimentaire allait de pair avec celle de son maintien et de son expression tant orale qu'écrite. Décédé le 7 juin 1961, "il repose sous les ombrages familiers des vieux arbres de son domaine familial", écrivait Sud Ouest à l'issue de ses obsèques. Il laisse le souvenir d'un grand maire et, comme on disait au XVIIème siècle, d'un honnête homme. "C'était un monsieur", disent encore avec respect les vieux Breuilletons.
Pour mieux cerner la riche personnalité de Daniel Michenot, lisez les discours prononcés lors de ses obsèques par son premier-adjoint, Abel Guérin, par le Sous-Préfet de Rochefort et par M. Groud, Président du Rotary Club de Royan.
Lisez aussi les articles que lui consacrait LA PRESSE.
Et retrouvez-le sur une très belle photo.
En 2011, sa famille commémorait le cinquantième anniversaire de sa disparition, en compagnie de nombreux amis.